Bonjour à tous,
C’est avec un grand plaisir que je vous propose aujourd’hui de faire plus ample connaissance avec Chris Simon, excellente auteure aux nombreux succès.
Bonjour Chris, pouvez-vous vous présenter brièvement ?
- Je suis franco-américaine. Je vis à Paris depuis cinq ans. Ma première série Lacan et la boîte de Mouchoirs, qui se passe entièrement dans un cabinet de psy, a été pendant trois mois dans le Top100 Amazon en 2013 et a été sélectionnée pour le Prix du livre numérique de 2014. Une troisième Saison est en cours d’écriture et devrait sortir le 7 novembre. Le format série satisfait mon appétit d’écriture, à tel point que j’ai écrit une deuxième série, Brooklyn Paradis, qui cette fois vient d’être publiée chez un éditeur, La Bourdonnaye.
Comment êtes-vous venue à l’écriture ?
- J’ai commencé à écrire assez jeune. Un jour que je faisais mes devoirs de math, une voix dans ma tête s’est mis à penser plus vite que moi. Elle pensait tout haut dans ma tête. Ainsi, chaque après-midi pendant une semaine, la voix parlait d’un débit accéléré, elle m’empêchait de me concentrer sur mes exercices. Je devenais folle, du moins, j’avais peur de le devenir. J’ai eu l’idée de fermer mon cahier de mathématiques et d’en ouvrir un autre, vierge, et j’ai écrit. C’est ainsi que la voix s’est tue. J’ai continué à écrire par période de plus en plus longues jusqu’à aujourd’hui.
Avez-vous des petits rituels sans lesquels il vous est impossible d’écrire ?
- J’aime écrire dans mon lit (sur mon ordinateur) tôt le matin. Pendant des années, j’ai acheté des carnets, puis des cahiers, j’en avais presque toujours un avec moi. Bien qu’aujourd’hui j’écrive sur mon smartphone quand une idée, un dialogue, me vient hors de chez moi, j’ai gardé ce rituel du cahier, j’en achète toujours, au format cahier d’écolier. À présent, je les utilise plus pour les corrections couplées avec mon Kindle.
Comment vous est venue l’idée de votre premier roman ?
- Je viens seulement de finir un premier roman (pas encore publié). J’ai écrit de nombreuses nouvelles (publiées en revues), des pièces de théâtre et des scénarios pendant pas mal d’années, mais je n’avais jamais fini un roman. Mes premières idées me sont venues en associant à la fois des personnes que j’ai rencontrées, des situations vécues ou non, des faits divers. Les gens que je rencontre ou que j’ai connus m’inspirent beaucoup et j’ai connu beaucoup de monde, car j’ai vécu dans des lieux tellement différents… Parfois une personne ou une émotion s’imprègne en moi et cela peut me prendre des années pour en faire quelque chose d’intéressant.
Rencontrez-vous des difficultés particulières pour la rédaction de vos écrits ?
- Bien sûr, une grande partie de l’acte d’écrire consiste à résoudre des problèmes. Certains sont plus difficiles que d’autres. Dans le roman que je suis en train de finaliser, je rencontre une difficulté de taille : comment donner de l’espoir au lecteur quand on raconte une partie de l’histoire tragique de l’humanité, quand on aborde le côté le plus sombre de l’être humain ? Est-ce même possible ?
Combien de temps s’écoule entre la première et la dernière ligne de l’un de vos livres ?
- Ça dépend vraiment du livre. Pour les séries, c’est plus rapide parce que j’ai une situation très précise et je travaille avec plus de méthode, afin de ne pas me perdre (Brooklyn Paradis possède de nombreux personnages et au fil des saisons, il va falloir m’y retrouver). L’écriture des 3 saisons de Lacan et la boîte de mouchoirs s’est fait sur un peu plus de 2 ans (je termine en ce moment la Saison 3 qui sort le 7 novembre). Les deux premières saisons étaient de pures improvisations. Chaque mois, j’écrivais une séance, la publiais sur Amazon, Kobo et iTunes, je l’éditais aussi et en faisais la promotion. Un épisode par mois était un bon rythme pour arriver à tout bien faire. La première Saison de Brooklyn Paradis m’a pris 3/4 mois d’écriture (non inclus la création du concept et des personnages). Mon roman m’a pris des années, c’était d’abord une nouvelle avant de devenir un roman, mais l’idée remonte à au moins 10 /15 ans.
Avez-vous tenté le chemin de l’édition traditionnelle? Pourquoi le choix de l’auto-édition ?
- Oui, avec un recueil de nouvelles, Le Baiser de la mouche. Je l’ai envoyé à 24 maisons d’édition en 2010, je crois. J’ai eu quelques retours encourageants d’éditeurs. Puis une m’a répondu oui, malheureusement ce n’était pas vraiment une maison d’édition. Je venais de m’installer en France, J’étais un peu innocente. Il y a beaucoup d’«éditeurs» (en numérique et papier) qui s’auto-proclament éditeurs et qui n’en sont pas. Un éditeur qui n’a pas de distributeurs ou de diffuseurs sérieux et un lectorat n’est pas un éditeur, un éditeur qui ne vous paie pas vos droits d’auteurs au premier exemplaire vendu et qui vous propose moins de 8% de droits d’auteurs est à fuir… Je pourrais continuer la liste… Choisissez un bon éditeur ou autoéditez-vous, mais évitez les piètres vendeurs de livres. Au final, ils vous font vendre votre livre à votre famille, vos proches et empochent le plus gros du bénéfice. Vendre à votre entourage vous pouvez le faire vous-même. 😉 L’autoédition est une vraie alternative pour un auteur. Elle lui permet de conserver ses droits (et droits dérivés), de commencer à se constituer son lectorat, de tester ses écrits, de publier et de maîtriser tout le processus du début jusqu’à la fin, et aussi d’être mieux rémunéré.
J’ai conçu et pensé Lacan et la boîte de mouchoirs 100% autoédition dès le départ, d’une part parce qu’il n’y avait pas de maison d’édition qui publiaient des séries courtes à cette époque, d’autre part parce qu’il aurait été difficile de vendre un livre pas encore écrit à une maison d’édition. Je suis assez impressionnée du chemin que ma série a fait, et continue de faire, grâce à la curiosité des lecteurs et aux plateformes numériques internationales comme Amazon et Kobo. Les ventes mensuelles de la série sont stables.
Quels sont vos coups de cœurs littéraires ?
- J’en ai eu beaucoup et à chaque période de ma vie. À l’adolescence, j’ai eu une passion pour les surréalistes. Je n’ai découvert et aimé les classiques que plus tard, Français, Russes, Anglais et Américains… Pour les contemporains : Nabokov, Gombrowicz, nombreux(ses) nouvellistes anglophones, Toni Morrison, Marguerite Duras… Je lis aussi les scénaristes William Goldman, Woody Allen… La liste est longue, d’autant plus que je lis en français et en anglais !
Vous êtes à l’origine du Mag des Indés, journal en ligne s’adressant aux auteurs indépendants, pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
- J’avais envie de partager mes lectures glanées en anglais et peu en français à l’époque autour de l’autoédition. Je partageais déjà mes réflexions sur le sujet sur mon premier Blog, Le Baiser de la mouche, avec une série de billets dont le premier s’intitulait Réfractaires, mais pas vaincus : http://chrisimon.com/refractaires-oui-mais-pas-vaincus/
J’ai eu l’idée de le faire sous forme de curation sur Scoopit. À mon grand étonnement, le Mag des Indés lors de sa première parution (février 2014) a reçu 400 visites en un seul weekend. Scoopit fonctionne aussi comme un réseau social, mais comme tout le monde n’a pas un compte Scoopit, j’ai ouvert également une page Google dédiée au Mag des indés qu’on peut suivre pour ne manquer aucun article. Le plus gros des articles est renouvelé chaque vendredi après-midi et ce durant tout le weekend, afin de créer un rendez-vous concret et à un moment de temps libre. Le Mag suit l’actualité de l’autoédition (numérique et papier). Il comporte aussi une rubrique de tutoriaux en français et parfois en anglais, des articles sur les nouveaux outils de publication, (corrections, logiciels, nouvelles plateformes…), le contexte économique, les statuts juridiques ; des billets sur le marketing ou sur l’écriture (technique, approche, formats, atelier d’écriture) pour progresser dans votre démarche artistique et même des billets sur des questions de fond.
Un Mag pour les indés, fait principalement par les Indés.
La plupart des informations ou réflexions viennent d’auteurs, de sites ou de groupes qui sont impliqués dans l’autoédition et partagent leurs expériences. Je voulais une adresse, un point de rencontre pour les autoédités. Maintenant si on nous cherche, on sait où nous trouver !
Quels sont vos projets ?
- Je viens de collaborer à un projet littéraire avec la Revue Saint Ambroise, dont l’idée est née il y a 2 ans, un numéro spécial Nouvelles des Amériques. Dans ce numéro, qui sortira en novembre, je propose à nos lecteurs les traductions de nouvelles de nouvellistes majeurs d’Amérique du Nord.
Je suis toujours en train de réévaluer ma situation, ma vie ; continuellement en train de me demander dans quelle direction emmener ceci ou cela… Je me la pose pour le Mag des Indés, comment faire évoluer ce Magazine qui répond à une véritable demande. J’ai aussi envie d’entreprendre au niveau créatif, au niveau de l’écriture. J’ai une formation pédagogique et une formation littéraire et scénaristique … J’ai pratiqué les ateliers d’écriture en tant que participante, mais aussi en tant qu’animatrice en France et aux États-Unis. Envie de combiner ces compétences, de développer de nouveaux ateliers, d’aller plus loin dans ce sens. Les choses sont en train de mûrir…
J’ai l’idée d’une nouvelle série qui me trotte dans la tête… Mais d’abord, je dois finir et publier la Saison 3 de Lacan et la boîte de mouchoirs.
Avez-vous un site internet ou un blog ?
- Oui, un site avec son blog intégré : http://chrisimon.com/
sur lequel vous trouverez des infos sur l’autoédition, mais aussi sur mes activités et mes livres.
Quel souhait vous tient le plus à cœur ?
- Que le concept d’auteur évolue en France. L’auteur n’est pas un enfant qui cherche un père (éditeur) et qu’on peut sous payer parce qu’il est mineur. L’auteur est un créateur, capable d’apprécier la complicité, la compréhension d’un éditeur autour de l’écriture et de ses livres, mais capable aussi de gérer son oeuvre. L’autoédition, telle qu’elle se pratique aujourd’hui, est une excellente étape d’émancipation pour un auteur. C’est aussi une opportunité !
Je remercie vivement Chris pour ses réponses sans détours. N’hésitez pas à vous rendre sur sa page auteure pour découvrir ses écrits :